« Quand les filles ne rentrent pas chez elles après les vacances... »
Dans le monde, selon l’UNICEF, 12 millions de filles sont mariées avant leur 18ème année. Parfois, elles n’ont pas 15 ans et disent adieu à l’école.
Plus d’études... cela signe la fin de toute évolution sociale.
Ce chiffre est en baisse depuis 25 ans. En effet la pratique de mariage forcé arrive à reculer et recule partout dans le monde grâce aux progrès liés à la scolarité, à la diminution de la pauvreté, à une prise de conscience des autorités publiques...mais une multitude de crises menace d’anéantir les progrès accomplis.
Prenons l’exemple de la pandémie du Covid-19 qui a porté atteinte aux programmes de prévention du mariage des enfants avec la fermeture des écoles, les restrictions en matière de déplacements, l’éloignement social, l’augmentation de la pauvreté et des inégalités ... toutes ces situations qui sont des catalyseurs connus du mariage des enfants.
Les Nations Unies ont fait de la fin de la pratique des mariages précoces l’une des cibles de leurs objectifs de développement durable.
On parle de mariage forcé lorsqu’un des partenaires, ou les deux, n’est pas en mesure de consentir librement à se marier, parce qu’il est soumis à des pressions, forcé ou menacé de violences.
La notion de consentement est essentielle : son absence ou son obtention sous la contrainte, la violence, le chantage ou encore la peur de décevoir la famille engendre le caractère forcé d’un mariage.
« Avec tout ce qu’on a fait pour toi, c’est comme ça que tu nous remercies » ;
« Je vais renvoyer ta mère au pays si tu n’obéis pas » ;
« On mariera ta sœur à ta place si tu refuses de l’épouser » ;
« Je vais divorcer de ta mère à cause de toi » ;
« Ta grand-mère va mourir si tu ne vas pas la voir » ;
« Si tu ne te maries pas, je te raye du livret de famille ».
Pour les personnes mineures on parle aussi de mariage précoce ; le partenaire qu’on leur impose est parfois beaucoup plus âgé.
Sont concernées très majoritairement des jeunes filles, adolescentes ou femmes mais il arrive que des garçons adolescents ou hommes soient touchés par cette pratique.
Les mariages forcés ne sont pas une affaire de religions, mais bien de cultures, de traditions et de coutumes.
Les mariages forcés, contraints ou arrangés ont toujours existé et ce dans toutes les cultures, même en France ou aux Etats-Unis. Ils sont directement en lien avec la condition des femmes et la manière dont les différentes cultures considèrent leurs droits et devoirs.
L’inégalité entre les genres constitue un fondement central de cette pratique.
Dans certaines sociétés, les filles ne sont pas perçues comme des individus à part entière, mais comme des êtres destinés à être sous la tutelle d’un homme, d’abord leur père, puis leur mari.
Cette pratique est encouragée par des explications sociales et culturelles multiples :
- La perpétuation du statut familial
- L’importance et la valorisation de la virginité des jeunes filles dont l’honneur de la famille dépendrait
- Utilisation du mariage comme une punition qui sert à remettre les enfants dans le droit chemin
- Arguments économiques : besoin de la dot, compensation matrimoniale, remboursement de dettes
- Arguments culturels et identitaires : peur de la mixité ethnique et/ ou religieuse qui pousse les parents à imposer un mariage endogame ; fixation sur la préservation d’une identité culturelle idéalisée et mise à mal par les migrations et l’interculturalité.
Une enfance volée, des vies menacées.
Pour les jeunes filles, les conséquences d’un mariage forcé sont dévastatrices :
- violence conjugale avec viols conjugaux, violences psychologiques
- privation de liberté
- grossesses précoces non désirées
Rappelons que les grossesses précoces sont la principale cause de mortalité des jeunes filles âgées de 15 à 19 ans dans le monde.
- conduite à risques pour les jeunes filles : dépressions profondes, automutilations, suicides.
- risque surélevé des maladies sexuellement transmissibles
- taux de mortalité plus élevé
Les taux les plus importants de mariages précoces s’observent en Asie du Sud (Bangladesh, Inde, Népal) et en Afrique Subsaharienne.
Explorez l'atlas du mariage des enfants de Girls Not Bride
Cet organisme de bienveillance est un partenariat mondial regroupant plus de 1400 organisations membres qui œuvrent pour mettre fin au mariage des enfants dans plus de 100 pays.
Que dit la loi ?
Les institutions internationales condamnent fortement le mariage forcé et supportent les femmes dans leur choix libre de partenaire.
- 1948 : L’article 16 (2) de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme stipule que « le mariage ne peut être conclu qu’avec le libre et plein consentement des futurs époux. »
- 1979 : L’article 16 de la Convention sur l’Élimination de toutes formes de Discriminations à l’égard des femmes affirme la liberté de choix du conjoint ainsi que la fixation d’un âge minimal pour le mariage.
La Convention a été signée par 90% des états membres des Nations Unies.
- 2013 : Pour la première fois, le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies vote une résolution contre les mariages des enfants, précoces et forcés.
- 2019 : Une nouvelle résolution du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU appelle les États à renforcer et accélérer leurs actions dans l’éradication des mariages forcés précoces.
Et en France ?
Selon l’enquête Trajectoire et Origines (INED -INSEE 2008), 4% des femmes immigrées vivant en France et 2% des filles d’immigrés nées en France âgées de 25 à 50 ans, ont subi un mariage NON consenti ou union avec un consentement altéré.
L’été est la saison des mariages d’enfants : des jeunes filles mineures sont alors emmenées dans le pays d’origine de leurs parents et certaines familles en profitent pour organiser alors le mariage forcé.
Cette période dans le pays d’origine favorise d’ailleurs également les mutilations sexuelles féminines.
L’Association Voix des Femmes a créé en France un dispositif dédié exclusivement à l’accompagnement des victimes de mariage forcé.
Dans le monde, 27 filles mineures sont mariées toutes les minutes.
Chaque enfant devrait pouvoir vivre une enfance, aller à l’école et surtout être libre.


