L’Humain au centre de l’Humanitaire
Il y a 10 ans, vous m’auriez demandé d’imaginer une mission humanitaire en tant que médecin Gynécologue Obstétricienne, je vous aurai répondu : consultations médicales, soins, actes chirurgicaux...
Ma première mission avec Gynécologie Sans Frontières en décembre 2016, dans les camps de migrants du Nord et du Pas de Calais, pouvait répondre à certains items... mais m’a surtout amenée à réfléchir sur une approche plus globale.
C’est ainsi que j’ai pris conscience que le respect et la connaissance de l’interculturalité sont indispensables pour participer à une mission humanitaire.
Mais cette compétence ne faisait pas partie de mon parcours universitaire classique...
Allez Vanina, il va falloir retourner bosser !!!
Courant 2021, Gynécologie Sans Frontières signe un partenariat avec Ascovime (ONG camerounaise créée par le Dr Georges Bwelle) pour la réalisation de missions de développement type SONU (Soins Obstétricaux Néonataux d’Urgence).
Je ne remercierai jamais assez, celui que je considère comme mon mentor, le Dr Serge Boyer, d’avoir pensé à moi pour ma première mission SONU en novembre 2021 à Garoua (région Extrème Nord - Cameroun). Ce fut une révélation !
L’objectif essentiel d’une mission SONU ?
Contribuer à la réduction de la mortalité maternelle et infantile à travers le renforcement des capacités du personnel soignant qui travaille dans des zones isolées très souvent sous médicalisées, à travers des cours théoriques, des échanges autour de différents cas cliniques, ateliers pratiques ou mises en situation. La mortalité maternelle (nombre de décès de femmes survenant au cours de la grossesse, de l’accouchement ou dans les 42 jours suivant la fin de la grossesse) dans le monde est aujourd’hui de 197 décès pour 100 000 naissances vivantes.
Mais il existe une répartition très inégale dans le monde...
L’Afrique sub saharienne est malheureusement très impactée.
9 pays sont en « état d’alerte très élevée » avec un taux moyen en 2020 à 551 décès / 100 000 naissances vivantes :
- Yemen
- Somalie
- Soudan du Sud
- République Arabe Syrienne
- République Démocratique du Congo
- République Centre Africaine
- Tchad
- Soudan
- Afghanistan
Taux de mortalité maternelle dans le monde en 2020
Un des objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU est de réduire ce taux à moins de 70 pour 100 000 naissances vivantes d’ici 2030.
Un tel objectif est impossible sans de nombreux axes d’amélioration dont celui du renforcement des capacités des soignants locaux.
Ces soignants sont en demande d’accompagnement et d’échanges pour travailler dans ce sens.
Même s’il est difficile d’écouter ces récits de prise en charge, dont parfois la fin est tragique, il est important pour eux qu’ils puissent raconter ce que leurs patientes vivent, subissent...et ce qu’ils doivent gérer souvent seuls dans des structures sanitaires isolées sous équipées.
J’ai eu l’opportunité de partir travailler sur des missions SONU à plusieurs reprises, au Cameroun en 2021 et 2022 avec l’ONG Ascovime et au Rwanda en 2023 avec l’ONG Save The Children.
Le projet d’une nouvelle mission SONU, cette fois en partenariat avec l’ONG Alima à Dakar, m’a tout de suite plu.
Ce projet différait des précédents sur 2 points que j’ai trouvés très enrichissants :
- Contrairement aux autres missions, je suis partie seule en tant que membre de GSF. Seule mais tellement bien accompagnée par l’équipe d’Alima. De nombreuses réunions préparatoires en amont du départ m’ont mise en confiance. Une fois sur place, j’ai tout de suite été intégrée à une équipe de professionnels de terrain ayant une très grande expertise dans le domaine des SONU : le Dr Rigobert KAZADI KABONGO (responsable de la mission), le Dr Hans Joerg LANG (pédiatre) et Me Nadège KARO N’ZUE Sage Femme remarquable.
Je tenais particulièrement à souligner l’importance de ce travail commun avec de tels professionnels de qualité.
Tout au long de la semaine de formation, j’ai pu profiter comme les participants de leurs expériences, leurs pratiques et savoir-faire et de leurs conseils qui m’ont aidée pour gérer le second point :
- Durant cette semaine de formation, les participants étaient issus de 9 pays africains différents (Cameroun Nigéria RDC Tchad Mali Niger Burkina Faso RCA Mauritane).
Il a fallu intégrer ce paramètre et de ce fait, également la diversité des moyens médicamenteux, techniques, des protocoles de soins, mais surtout des cultures et religions.
J’ai eu l’impression de voyager 9 fois en une seule mission !!
Une fois encore, je suis convaincue de l’importance de ces missions SONU, car l’apprentissage et le partage de compétences restent le ciment de tout espoir de développement et d’autonomie pour ces pays qui luttent tous les jours, pour améliorer la prise en charge médicale des femmes.
Dr Vanina CHAREYRE





