Nous vous l’annoncions dans notre newsletter de janvier, une équipe de Gynécologie Sans Frontières s’est rendue, en ce début d’année 2023, dans la Province du Sankuru, au cœur de la République Démocratique du Congo, avec pour objectifs d’évaluer les conditions de l’anesthésie et les axes d’amélioration pour l’Hôpital mère-enfant « Otema » créé à Lodja par le Dr Tony Elongé.

En effet, sollicités, il y a 3 ans, par notre confrère, afin d’apporter notre expertise et soutien à cette structure, nous avions constaté, lors de son évaluation en 2019, des carences importantes en anesthésie, entravant la chirurgie gynécologique.

La mission reportée à plusieurs reprises en raison de la pandémie Covid 19, a été menée du 21 janvier au 3 février derniers, par Anne-Marie Lechartier, gynécologue obstétricienne et Françoise Bayoumeu, anesthésiste-réanimatrice.

 

Depuis notre venue en 2019, la situation a changé : Tony, alors médecin chef de la Zone de Santé de Tshudi Loto, est devenu, il y a 7 mois, ministre de la Santé de la Province du Sankuru.

Notre mission va donc se déployer à l’échelle de ce territoire qui compte plus de 2 millions d’habitants pour une surface équivalente à 9 fois l’Ile de France.

D’un point de vue sanitaire, le Sankuru compte 16 zones de santé comprenant chacune un hôpital général de référence (HGR), des centres de santé et enfin des postes de santé.

Tony a convoqué des représentants de différents centres de santé et ce sont 12 élèves de chirurgie et autant en anesthésie qui seront présents à Otema durant toute la mission afin de participer à nos formations.

Les élèves sont des médecins ou infirmiers qui font de l’anesthésie : matin au bloc et après midi cours théoriques. Jamais il n’y avait eu au Sankuru de cours d’anesthésie : le succès est total. La radio interviewe nos deux intervenantes et diffuse le message de nos consultations gratuites à Otema. La patiente la plus lointaine viendra de 600 km !

Pour la chirurgie, le travail est différent. Les annonces radiophoniques font venir un flot de patientes. Pour former, il faut du temps pour interroger, examiner, discuter les hypothèses. En fin de journée, il faut voir les examens complémentaires, expliquer aux étudiants et à la patiente la démarche de soin et les possibilités de traitement. Nous verrons 86 femmes en 9 jours.

Françoise, Tony et Anne-Marie

Durant toute la mission, notre équipe constate un très grand dénuement rendant un perfectionnement de l’anesthésie impossible en l’état. L’amélioration de la situation nécessite une augmentation des moyens tant matériels qu’humains ainsi qu’un long accompagnement.

La seule richesse actuelle de Lodja étant ses hommes et ses femmes qui continuent à soigner, à travailler, en attendant un salaire qui ne vient pas toujours et qui veulent apprendre encore et encore. A Otema, la devise de Gynécologie Sans Frontières prend tout son sens : Accompagner, transmettre, former sans se substituer...

Nos remerciements les plus chaleureux vont au Dr Tony ELONGE, au Dr Liévin ETAMU, aux médecins, à tout le personnel et aux patientes d’OTEMA, pour leur accueil et leur confiance

Retrouvez le compte-rendu de cette mission sur notre site,

ainsi que dans le numéro 17 du Journal « Le Monde de Gynécologie Sans Frontières » dont la sortie est programmée en mai 2023

Dans un pays où la natalité est parmi les plus élevées, où la mortalité infantile et maternelle sont importantes en raison d'un système médical peu développé, dans un pays où le viol est toujours utilisé comme arme de guerre, le projet « Otema » est un défi de taille :  rendre aux femmes leur place essentielle dans le tissu social de la société congolaise.

Tout comme son célèbre confrère, le Dr Denis Mukwege, prix Nobel de la Paix 2018,  le Dr Tony Elonge, Gynécologue Obstétricien Congolais, a choisi de consacrer sa carrière à la rémission physique, psychologique et sociale des femmes souffrant de fistules, affection liée à un évènement traumatique (violence sexuelle) ou obstétricale (accouchement mal pris en charge ou avec complication), les rendant incontinente et les excluant, de fait de la société et de leur famille.

L’hôpital  « Otema » qu’il a construit dans sa ville natale Lodja, dans le SANKURU, procure un accès à la santé maternelle à l'ensemble de cette province située au cœur du pays.