Par le 25 novembre 2013 à 20h00

Installée sur la frontière syro-jordanienne, L’ONG Gynécologie Sans Frontières a aidé pendant près d’un an des centaines de réfugiées syriennes à donner la vie. Le docteur Claude Rosenthal qui a fait partie de l’une de ces missions, nous ouvre son album de photos et de souvenirs.

Syrie : elles accouchent en pleine guerre© Claude Rosenthal

12 janvier 2010. Un séisme de magnitude 7 frappe l’île d’Haïti faisant plus de 230 000 morts, 300 000 blessés et plus d’un million de sans-abris. Ces images terribles, qui font la une des JT, sont un déclic pour le docteur Claude Rosenthal. A la retraite depuis 2007, ce gynécologue-obstétricien se dit qu’il peut « encore servir ». Il contacte alors l’ONG Gynécologie Sans Frontières (GSF) qui assiste depuis 1995 les femmes dans les pays où les infrastructures de santé sont insuffisantes. Lors des missions d’urgence, GSF sécurise les accouchements, réhabilite les maternités et forme le personnel. Rapidement, Claude multiplie alors les départs en Afrique, notamment au Burundi, où en avril 2010 il opère les femmes souffrant de fistules.

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Août 2012. Alors que la guerre perdure en Syrie, le ministère des Affaires Étrangères demande à l’ONG française d’assurer les accouchements dans le camp jordanien de Zaatari, à 15 km de la frontière syrienne. Quand la première équipe de GSF arrive sur place, près 35 000 personnes, dont 75 % de femmes et d’ enfants, y sont réfugiées. Les hommes eux repartent souvent assez vite au combat. Quelques mois plus tard, alors que le flux de réfugiés ne se tarit pas, le camp comptera jusqu’à 130 000 Syriens. Soit l’équivalent de la 4e ville de Jordanie ou de la ville de Tours. Huit accouchements ont alors lieu chaque jour en moyenne sur cet énorme plateau aride balayé par les vents. Sans compter que toutes les nuits, des ambulances traversent la frontière pour y apporter des blessés qui sont soignés et opérés sur place.

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Septembre 2012. Claude fait partie de la 3e mission à se rendre à Zaatari. Toutes les trois semaines, deux gynécologues et deux à quatre sages-femmes (en fonction des besoins) se relaient sur place. Il s’agit de retraités ou de travailleurs bénévoles qui sacrifient leurs congés pour pouvoir partir. Installée dans le camp militaire français, la tente de travail de GSF comprend une salle de préparation qui fait office de pharmacie, une salle d’accouchement, une salle de consultation (qui se transformera en 2e salle d’accouchement) et une salle d’attente toujours pleine. Si bien que six heures après leur accouchement, les jeunes mères sont contraintes de laisser leur place pour rejoindre leur tente. « Au départ, l’équipe suivait les nouveau-nés, mais avec l’augmentation du nombre d’accouchement cela était de plus en plus difficile », raconte Claude.

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Deux interprètes jordaniennes travaillent également avec l’équipe pour mieux connaître la vie de ces femmes et l’histoire de leurs grossesses. Les différences culturelles se font ressentir : les futurs papas n’assistent pas à l’ accouchement, les Syriennes ont plus d’enfants (6-7 en moyenne par femmes) et les nouveau-nés sont tout emmaillotés. Mais ce qui a le plus surpris Claude Rosenthal, c’est le nombre impressionnant de femmes venant consulter pour des problèmes de stérilité. « En temps de guerre, force est de constater que ces femmes ressentent le besoin de faire des enfants, pour aller de l’avant et se tourner vers l’avenir », explique-t-il.

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Novembre 2013. En plus d’un an, plusieurs centaines de femmes ont été prises en charge par GSF et toutes ont survécu à leur accouchement. Les services de santé jordaniens viennent de prendre le relais et gèrent les naissances. GSF s’est retirée du camp. L’organisation réfléchit désormais à de nouveaux terrains d’action, notamment aux Philippines, pays ravagé début novembre par le cyclone Haiyan qui a fait plusieurs milliers de victimes.

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